Reprise, film emblématique réalisé par Hervé Le Roux, plonge dans l'univers du cinéma documentaire français et explore les luttes sociales et humaines. À (re)découvrir absolument
Réalisateur | Le Roux Hervé |
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Au début c’est une photo, une photo dans une revue de cinéma… Une jeune femme brune, révoltée, qui crie. Nous sommes en juin 68, c’est la reprise du travail aux usines Wonder, après la grève de mai. Deux étudiants de l’IDHEC filment la scène. On y voit des ouvrières de Wonder à Saint-Ouen qui reprennent le travail après trois semaines de grève. Et cette jeune femme qui reste là et qui crie de nouveau. Elle crie qu’elle ne retournera pas au travail, qu’elle ne veut plus retrouver la saleté, les cadences, la « méprise » de cette « taule ». Plus de trente ans après, hanté par le visage et la voix de cette femme, Hervé Le Roux est parti à sa recherche.
Positif : "Le second long métrage d’Hervé Le Roux pourrait n’être qu’une investigation documentaire, reconstituant sur un mode didactique les conditions de travail dans les anciennes usines Wonder. Il pourrait s’ordonner selon l’équilibre traditionnel : questions-réponses, entretiens-documents d’archives, exposer les faits en somme, avec une apparence d’ objectivité qui en appellerait à la conscience (et à la patience) du spectateur. Mais le projet est d’une tout autre nature, qui fait de Reprise une œuvre à part entière, et offre à ces trois heures de témoignages l’ampleur même d’une fresque romanesque."
Télérama : "Dans le calme, et grâce à la force d’évocation des témoignages, naît sous nos yeux une matière romanesque, avec ses figures invisibles et récurrentes : le chef du personnel, Pierotti, dont les grévistes de 68 brûlèrent l’effigie ; la terrible mère Campin, qui dirigeait à la baguette l’atelier du « noir » (celui d’où les ouvrières sortaient toujours « dégueulasses », à cause du manganèse et du charbon)... Avec aussi des épisodes quasi burlesques, comme celui de mademoiselle Marguerite, une chef d’atelier agressant à coups de parapluie Bernard Tapie (qui avait racheté Wonder en 1984). Tout cela teinté d’une étrange nostalgie, celle d’un temps où c’était dur, mais où on savait contre qui se battre."
Libération : "Reprise nous regarde à son tour et fascine par sa manière tendre mais insistante de débusquer quelques questions de fond que plus grand-monde n’ose poser avec autant d’acuité à l’heure contemporaine du tout-image : justement, qu’est-ce qu’une image ? Qu’est-ce qu’elle nous dévoile et nous cache dans le même mouvement ? Comment la lit-on ? Et même, par un bel effet de boomerang autocritique : de quelle idéologie relève aujourd’hui notre confiance aveugle ou notre méfiance éclairée pour tout ce qui se pare de la caution « documentaire » ?"
« C’est un film terrifiant, qui fait mal ... un film vraiment révolutionnaire. » (Jacques Rivette - Les cahiers du cinéma)
Point de départ du film d’Hervé Le Roux, cette séquence devenue emblématique pour raconter Mai 68, une séquence tournée par des étudiants de l’IDHEC (école des hautes études cinématographiques). Lorsque l’équipe de jeunes cinéastes se présente dans la matinée le 9 juin 1968 à l’entrée de l’usine Wonder pour filmer son occupation depuis trois semaines par les ouvriers, ceux-ci viennent de voter la reprise du travail. Une jeune femme refuse de rentrer. Elle crie : « Je ne rentrerai pas, non je ne rentrerai pas », « Je ne veux plus refoutre les pieds dans cette taule dégueulasse ». Autour d’elle des ouvriers s’attroupent. Les délégués syndicaux, artisans de la reprise, s’approchent et tentent de la calmer. Un étudiant de passage met de l’huile sur le feu. Il n’en fallait pas plus pour que ce plan séquence devienne un des classiques du cinéma direct.
Ce document aurait dû constituer une séquence du long-métrage Sauve qui peut Trotsky, film sur le mouvement militant de l’OCI, l’organisation communiste internationale, que Jacques Willemont tournait en mai et juin 68. Mais les rushs disparaitront de façon étrange et seule la séquence de la reprise du travail aux usines Wonder sera sauvée, devenant « la scène primitive du cinéma militant, la sortie des usines Lumière à l’envers, un moment miraculeux dans l’histoire du cinéma direct » pour Serge Daney et Serge le Perron.
Au début c’est une photo, une photo dans une revue de cinéma… Une jeune femme brune, révoltée, qui crie. Nous sommes en juin 68, c’est la reprise du travail aux usines Wonder, après la grève de mai. Deux étudiants de l’IDHEC filment la scène. On y voit des ouvrières de Wonder à Saint-Ouen qui reprennent le travail après trois semaines de grève. Et cette jeune femme qui reste là et qui crie de nouveau. Elle crie qu’elle ne retournera pas au travail, qu’elle ne veut plus retrouver la saleté, les cadences, la « méprise » de cette « taule ». Plus de trente ans après, hanté par le visage et la voix de cette femme, Hervé Le Roux est parti à sa recherche.
Positif : "Le second long métrage d’Hervé Le Roux pourrait n’être qu’une investigation documentaire, reconstituant sur un mode didactique les conditions de travail dans les anciennes usines Wonder. Il pourrait s’ordonner selon l’équilibre traditionnel : questions-réponses, entretiens-documents d’archives, exposer les faits en somme, avec une apparence d’ objectivité qui en appellerait à la conscience (et à la patience) du spectateur. Mais le projet est d’une tout autre nature, qui fait de Reprise une œuvre à part entière, et offre à ces trois heures de témoignages l’ampleur même d’une fresque romanesque."
Télérama : "Dans le calme, et grâce à la force d’évocation des témoignages, naît sous nos yeux une matière romanesque, avec ses figures invisibles et récurrentes : le chef du personnel, Pierotti, dont les grévistes de 68 brûlèrent l’effigie ; la terrible mère Campin, qui dirigeait à la baguette l’atelier du « noir » (celui d’où les ouvrières sortaient toujours « dégueulasses », à cause du manganèse et du charbon)... Avec aussi des épisodes quasi burlesques, comme celui de mademoiselle Marguerite, une chef d’atelier agressant à coups de parapluie Bernard Tapie (qui avait racheté Wonder en 1984). Tout cela teinté d’une étrange nostalgie, celle d’un temps où c’était dur, mais où on savait contre qui se battre."
Libération : "Reprise nous regarde à son tour et fascine par sa manière tendre mais insistante de débusquer quelques questions de fond que plus grand-monde n’ose poser avec autant d’acuité à l’heure contemporaine du tout-image : justement, qu’est-ce qu’une image ? Qu’est-ce qu’elle nous dévoile et nous cache dans le même mouvement ? Comment la lit-on ? Et même, par un bel effet de boomerang autocritique : de quelle idéologie relève aujourd’hui notre confiance aveugle ou notre méfiance éclairée pour tout ce qui se pare de la caution « documentaire » ?"
« C’est un film terrifiant, qui fait mal ... un film vraiment révolutionnaire. » (Jacques Rivette - Les cahiers du cinéma)
Point de départ du film d’Hervé Le Roux, cette séquence devenue emblématique pour raconter Mai 68, une séquence tournée par des étudiants de l’IDHEC (école des hautes études cinématographiques). Lorsque l’équipe de jeunes cinéastes se présente dans la matinée le 9 juin 1968 à l’entrée de l’usine Wonder pour filmer son occupation depuis trois semaines par les ouvriers, ceux-ci viennent de voter la reprise du travail. Une jeune femme refuse de rentrer. Elle crie : « Je ne rentrerai pas, non je ne rentrerai pas », « Je ne veux plus refoutre les pieds dans cette taule dégueulasse ». Autour d’elle des ouvriers s’attroupent. Les délégués syndicaux, artisans de la reprise, s’approchent et tentent de la calmer. Un étudiant de passage met de l’huile sur le feu. Il n’en fallait pas plus pour que ce plan séquence devienne un des classiques du cinéma direct.
Ce document aurait dû constituer une séquence du long-métrage Sauve qui peut Trotsky, film sur le mouvement militant de l’OCI, l’organisation communiste internationale, que Jacques Willemont tournait en mai et juin 68. Mais les rushs disparaitront de façon étrange et seule la séquence de la reprise du travail aux usines Wonder sera sauvée, devenant « la scène primitive du cinéma militant, la sortie des usines Lumière à l’envers, un moment miraculeux dans l’histoire du cinéma direct » pour Serge Daney et Serge le Perron.
Reprise